En Suisse, il est encore difficile de trouver des solutions appropriées pour aider les réfugiés. Des mesures inadéquates ont été prises, en particulier dans le domaine des droits des enfants et des jeunes. Afin de contrer au mieux cette situation, de nombreuses personnes s’impliquent – souvent bénévolement – dans diverses organisations et projets afin d’aider ces enfants et ces jeunes et de leur offrir des perspectives.

Par le biais d’une campagne sur les réseaux sociaux, le Comité des jeunes pour une Suisse ouverte souhaite attirer l’attention sur la situation des enfants et des jeunes réfugiés en présentant d’une part le travail des organisations et des projets et d’autre part en donnant la parole aux personnes concernées. Stay tuned !

L’histoire de Mahmud (4/4)

« L’arrivée en Suisse a été un grand soulagement. Au début, j’étais nerveux parce que je ne savais pas si je pourrais rester. Lorsque j’ai reçu une décision positive, la joie que j’ai ressentie était indescriptible. Je me suis donc rapidement occupé de trouver du travail, car je ne voulais pas dépendre de l’aide sociale. Je me sens bien intégré en Suisse. Je me suis fait beaucoup d’ami·e·s suisses, surtout en jouant au foot dans un club. Chaque fois que je suis sur le gazon et que je joue, je suis envahi par l’extraordinaire sentiment de liberté, que je n’ai pas toujours connue. Je souhaite cette même liberté à chaque personne sur terre. »

L’histoire de Mahmud (3/4)

« Avec l’aide de ma sœur, je me suis préparé afin de quitter l’Irak en passant par la Turquie. J’ai voyagé dans un bus avec 50 autres personnes. L’air était étouffant et la climatisation ne fonctionnait pas, ce qui en Irak, avec des températures record de plus de 55 degrés, peut considérablement altérer le bien-être des gens. Nous avons rapidement passé la frontière avec un simple contrôle des passeports. En Turquie, j’ai loué une chambre à bon marché pendant deux semaines, car je devais attendre un signe des passeurs qui me transporteraient à travers une partie de la Méditerranée jusqu’en Grèce. A ce moment, j’avais très peur, d’autres réfugié·e·s revenaient après avoir refusé de monter dans une de ces embarcations pneumatiques. Le voyage en mer a duré quelques heures et je n’oublierai jamais mon soulagement lorsque j’ai aperçu le sol grec. En Grèce, j’ai dû attendre quelques mois avant de pouvoir passer par la route des Balkans à travers la Serbie, la Slovénie et l’Autriche pour enfin arriver en Suisse. Ce périple était étroitement lié à la peur et à l’incertitude. Les gardes-frontière nous ont plusieurs fois battu·e·s et traité·e·s comme des personnes de troisième ordre. En Suisse, j’ai pu serrer ma sœur dans les bras et nous avons pleuré très fort de joie. Ce fut le début d’une nouvelle vie. »

L’histoire de Mahmud (2/4)

« Un soir, je suis rentré chez moi et j’ai su que ma vie allait changer pour toujours. J’ai vu ma mère qui me tendait une lettre avec les yeux emplis de terreur. J’ai pris la lettre et je l’ai lue. Jamais auparavant je n’avais reçu de telles menaces. J’avais une semaine pour quitter le pays, ou on me tuerait ainsi que ma famille. En tant que soldat, j’étais régulièrement confronté à la mort, mais cette fois il s’agissait aussi de mes proches. C’était clair pour moi que je devais partir. J’ai donc contacté ma sœur, qui vit en Suisse depuis 10 ans, et lui ai demandé de l’aide. Ainsi, mon voyage a commencé… »

L’histoire de Mahmud (1/4)

« Je m’appelle Mahmud Al-Rubai et j’ai 25 ans. Je travaille actuellement à la cantine de l’école cantonale de Winterthour. Mais avant de pouvoir vivre une vie normale en liberté, j’ai enduré pas mal de choses. En 2015, j’ai dû quitter mon pays, l’Irak. Auparavant, la situation était déjà très tendue avec l’émergence de milices terroristes. En particulier l’Etat islamique (EI) n’a cessé de se répandre, jusqu’à gagner des régions entières. En tant que jeune homme qui conduit un style de vie plutôt modéré, c’est facile d’attirer rapidement les regards. J’avais quand même l’espoir d’un meilleur avenir en Irak. Lorsque j’ai eu la possibilité de m’engager contre ces crimes, je l’ai exploitée et j’ai rejoint l’armée irakienne… »

L’histoire d’Ezatullah : Les études, mon projet pour l’avenir (4/4)

« Je m’appelle Mahmud Al-Rubai et j’ai 25 ans. Je travaille actuellement à la cantine de l’école cantonale de Winterthour. Mais avant de pouvoir vivre une vie normale en liberté, j’ai enduré pas mal de choses. En 2015, j’ai dû quitter mon pays, l’Irak. Auparavant, la situation était déjà très tendue avec l’émergence de milices terroristes. En particulier l’Etat islamique (EI) n’a cessé de se répandre, jusqu’à gagner des régions entières. En tant que jeune homme qui conduit un style de vie plutôt modéré, c’est facile d’attirer rapidement les regards. J’avais quand même l’espoir d’un meilleur avenir en Irak. Lorsque j’ai eu la possibilité de m’engager contre ces crimes, je l’ai exploitée et j’ai rejoint l’armée irakienne… »

L’histoire d’Ezatullah : L’intégration en Suisse (3/4)

« Pendant mes deux ans d’apprentissage, j’ai beaucoup appris. J’ai par exemple commencé à assimiler le dialecte bernois, ce qui m’a beaucoup aidé et m’a permis de me sentir plus proche des gens. Lorsque je parle l’allemand standard avec des Suisse·sse·s, la première question est généralement : « Depuis combien de temps es-tu en Suisse ? ». Alors que quand je parle le dialecte bernois, cette question arrive bien plus tard et je me sens beaucoup plus proche des gens.

Vu que je commençais le travail à 5 h, je devais partir de la maison à vélo à 4h20, ce qui me convenait, même par mauvais temps. Mais lorsque l’hiver est arrivé, j’ai eu besoin d’une chambre plus proche du travail, et mon entreprise m’a aidé.

Un jour, il y a eu un entretien avec plusieurs personnes dont des agriculteurs/trices, et mon chef nous a toutes et tous présenté·e·s. Il a dit que j’étais un bon exemple d’intégration réussie et que les gens ne devaient pas considérer négativement les étrangers/ères et les réfugié·es. Cela m’a donné beaucoup d’assurance.

Vu que j’ai un permis F, je ne peux pas quitter la Suisse. Je passe donc beaucoup de temps à découvrir ce pays. Je participe à plusieurs projets bénévoles, comme avec le SCI. C’est une bonne manière de rencontrer plein de monde pendant mes vacances. J’ai aussi déjà skié et, malgré un petit accident, je participe toujours à un camp de ski pendant l’hiver. Je prends toujours une fondue avec. »

L’histoire d’Ezatullah : ma formation de fromager (2/4)

« Grâce à une autre personne que j’ai connue au Café-Culture, j’ai pu trouver une chambre dans une famille d’accueil. Je pense que c’est pratiquement impossible de trouver une chambre sans l’aide de suisse·sse·s.

Vu que je pouvais indiquer ma famille d’accueil suisse comme référence, j’ai pu trouver une place dans une fromagerie pendant 5 mois. A l’origine, mon chef ne savait pas ce qu’était le statut N, mais il s’est impliqué afin que je puisse avoir cette place. J’en étais vraiment heureux.

Pendant cette période, j’ai eu le deuxième entretien concernant ma procédure d’asile en Suisse. Après un an et demi, à ma grande déception, j’ai reçu une décision négative. Sans faire de recours, je disposais donc de 30 jours pour quitter la Suisse. J’étais très triste, car je m’étais bien intégré dans mon entreprise et que j’avais même reçu une proposition d’apprentissage.
Avec l’aide d’une avocate, j’ai pu déposer un recours et on m’a donné raison en seconde instance ; j’ai donc reçu le permis F, une étape importante dans mon processus d’intégration. J’ai eu de la chance de recevoir rapidement une réponse. Je connais en effet des gens qui doivent attendre longtemps avant de recevoir une décision sur leur demande d’asile et cette incertitude, la conscience qu’il faudra peut-être quitter le pays rapidement, est très perturbante.

J’ai donc pu commencer mon apprentissage d’employé en industrie laitière. »

L’histoire d’Ezatullah / L’arrivée en Suisse (1/4)

« Je m’appelle Ezatullah et je viens de la province de Parwân, à proximité de Kaboul en Afghanistan. J’ai fait des études d’économie à Kaboul pendant 4 ans et j’ai obtenu un bachelor en Business Administration. Je voulais commencer mon master, mais à ce moment la situation dans mon pays s’est gravement détériorée. Les Talibans ont pris le contrôle de mon village natal, là où j’ai grandi, et je craignais pour ma vie. C’est pourquoi j’ai quitté l’Afghanistan. J’ai décidé de venir en Suisse et de demander l’asile ici car c’est un pays neutre. Le voyage jusqu’en Suisse a été long et difficile, en voiture, en bus, à pied, en bateau et en train.

Lorsque je suis arrivé en Suisse, j’ai rapidement été placé dans le canton de Berne. J’ai vécu dans le centre pour requérants d’asile à Gümligen. C’était assez étrange pour moi d’habiter deux étages sous terre. Nous n’avions aucun cours d’allemand officiel et ne pouvions exercer aucun travail. Par trois fois j’ai trouvé une place de travail, mais j’ai dû y renoncer car je n’avais pas de permis F.

J’ai donc appris l’allemand surtout grâce à des relations sociales, car je trouvais important de bien m’intégrer. Il y a un programme Café-Culture qui permet aux Suisses et aux réfugiés de se rencontrer. Je suis resté en contact avec des gens que j’ai rencontrés là. D’ailleurs, je fais régulièrement des sorties en Suisse avec une personne que j’ai connue au Café-Culture, c’est ainsi que la photo au Grütli a été prise.  C’était intéressant de découvrir l’histoire suisse et de me rendre à cet endroit historique. »

Camp d'été interculturel youngCaritas / Jara et Vanessa, participantes du camp d’été (1/4)

Il y a quelques semaines, le camp d’été interculturel de youngCaritas a réuni des jeunes requérant-e-s d’asile mineur-e-s non accompagné-e-s des structures de Caritas et des jeunes de Suisse. Le camp a été planifié et géré par des bénévoles de youngCaritas. Pendant une semaine, les participant-e-s ont tissé des liens sociaux, renforcé leurs compétences interculturelles et se sont activement impliqué-e-s dans des ateliers. Au cours des semaines qui suivront, les participant-e-s discuteront de leur ressenti concernant le camp.

« Une des plus belles expériences a été de voir comment l’interculturalité est devenue visible. Par exemple, un jeune Afghan expliquait quelque chose à une fille venue du Tibet, ou une des participantes les plus introverties, qui se tient parfois à l’écart, s’est épanouie. Voir quelque chose comme ça arriver, la voir participer et même danser, je trouve ça tellement beau. C’est très touchant et beau de constater qu’il y a des choses qui dépassent les cultures et qui deviennent visible. Pour moi, c’était le point fort de ce camp.

Dans ce camp, tout le monde s’aide et fait preuve de solidarité, que ce soit lors des superbes sorties et ou des activités autour de la maison, et je trouve ça très beau. »

Camp d'été interculturel youngCaritas / Omid, participant du camp d’été (2/4)

« Chaque aspect de ce camp était exceptionnel. Nous avons passé du bon temps ensemble. Nous avons vécu un camp d’été multiculturel. Ensemble, nous avons mangé, joué et entrepris plein d’activités. Ce que j’ai préféré, c’était la salle de répétition, parce que je suis beaucoup en contact avec la musique. J’ai aussi beaucoup aimé la nourriture. Et cette maison sur la montagne, dans le calme, où nous étions entre nous, j’ai trouvé ça bien. Les clips vidéo que les jeunes ont faits, où ils ont tout joué dans le style de Micheal Jackson, m’ont aussi beaucoup plu. »

Camp d'été interculturel youngCaritas / Céline, responsable du camp (3/4)

« Ce que j’ai particulièrement aimé dans ce camp ? L’ensemble ! Dans le camp, il y a tellement de personnes différentes qui se rencontrent et nous nous y retrouvons d’une manière ou d’une autre, peu importe d’où nous venons, ce que nous avons vécu avant ou ce que nous sommes en train de vivre. Nous passons une semaine ensemble, et le divertissement est au premier plan. De nouveaux liens sont tissés. Par exemple, nous nous sommes vraiment amusés à la piscine – il ne faut pas beaucoup de mots pour se comprendre. A côté des moments drôles, il y a aussi la place pour des discussions riches et sérieuses, dans lesquelles on apprend beaucoup sur les gens, sur les autres cultures, les autres pays. On découvre aussi des choses tristes. Mais je trouve que cet échange est vraiment super. Il y a plein de petits moments comme ça. Lorsqu’un jeune d’Afghanistan cuisine kabouli ou lorsque je vois que je peux apporter de la joie à quelqu’un avec un petit quelque chose, ou lorsqu’on arrive à motiver les participants. Ce sont les détails qui composent ce camp. »

Camp d'été interculturel youngCaritas / L’équipe du camp (4/4)

« Nous aimerions que toute la société soit comme ce camp d’été interculturel. Que chacun se rencontre et puisse s’amuser ensemble, peu importe d’où on vient. Qu’on apprenne les uns des autres, que chacun apporte ses remarquables capacités. Ce serait beau si nous pouvions vivre dans une société où chacune et chacun peut s’épanouir. »

Le grand voyage et la nouvelle vie d’Ashu / Le voyage jusqu’en Suisse (1/4)

« Je m’appelle Ashuqullah, mais tout le monde m’appelle Ashu, c’est plus simple. Je viens de Jalalabad, une ville à proximité de Kaboul, tout à l’est de l’Afghanistan. Le 26 novembre 2015, j’ai quitté ma maison. J’avais alors 14 ans. En passant par Kaboul, j’ai pris un bus jusqu’à la frontière iranienne. Nous avons ensuite traversé en voiture jusqu’en Iran et continué notre voyage dans le désert. Plus tard, alors que nous traversions les montagnes à pied, nous avons perdu beaucoup de personnes qui avaient épuisé toutes leurs forces, ça a été un moment très difficile pour moi. Arrivés à la frontière turque, nous avons été chargés dans un camion pour passer, avant de continuer avec des bus réguliers jusqu’à Istanbul. Mais je n’ai pas aimé cette ville. Nous étions 20 dans une petite chambre. Trois jours plus tard, nous avons donc repris la route jusqu’en Bulgarie. Il nous a fallu quatre essais pour pouvoir entrer dans le pays, car à chaque fois la police nous arrêtait à la frontière, nous prenait tout notre argent et nous renvoyait. Une fois passés, nous avons marché trois jours dans la forêt avant d’arriver à Sofia, où nous avons reçu des papiers pour poursuivre notre périple en direction de l’ouest. Après être arrivé en train à Buchs, à la frontière suisse, j’ai enfin pu déposer ma demande d’asile, car pour moi c’était évident dès le départ que je souhaitais venir en Suisse et que ce pays deviendrait mon nouveau chez moi. »

Le grand voyage et la nouvelle vie d’Ashu / La nouvelle vie en Suisse (2/4)

« Après mon arrivée en Suisse, j’ai été hébergé pendant trois mois au centre pour requérants d’asile Juch à Zurich. J’avais alors 14 ans et je vivais avec des adultes du monde entier, ce n’était pas très agréable. Après cette période, j’ai été transféré dans un nouveau foyer pour requérants d’asile mineurs (MNA) à Wiesendangen, où j’étais seul au départ. Mais très vite d’autres MNA sont arrivés et nous avons rapidement été plus de 30 jeunes de différents pays. C’était très différent de ce à quoi je m’attendais, car après la période au centre de Zurich, j’espérais être accueilli dans une famille.

Dans le foyer, nous étions huit jeunes requérants d’asile originaires d’Afghanistan, je parlais donc souvent persan ou pachtou. Cela rendait très difficile mon apprentissage de l’allemand, nécessaire à mieux m’intégrer. Les cours avaient lieu dans la cave du foyer. Entretemps, j’avais eu 15 ans, je parlais déjà anglais et j’estimais avoir appris pas mal, mais malgré cela tout le monde suivait le même cours à un niveau très bas. Les cours visaient à nous enseigner les fondements des mathématiques et de la langue allemande. J’étais complètement sous-estimé et cela me rendait triste. Je suis convaincu d’avoir perdu là un à deux ans de ma vie.

Un des éducateurs du foyer souhaitait changer de lieu de travail et je lui ai parlé, lui expliquant que je voulais aussi m’en aller. Grâce à son aide, j’ai pu déménager quelques mois plus tard dans un logement du Jugendnetzwerk à Horgen. J’ai pu suivre un cours d’allemand pendant trois mois et enfin intégrer la 10eclasse à l’école de Horgen.

Je voulais absolument une place d’apprentissage, mais je comprenais bien que ce serait difficile sans un diplôme. J’ai donc attendu mon premier bulletin semestriel de 10eannée et j’ai aussitôt commencé à chercher une place d’apprentissage. Chaque jour j’écrivais deux à trois lettres de candidature et je me suis rendu à la bourse des places d’apprentissage organisée par la ville de Zurich. C’est là que j’ai rencontré Madame Barbara du home pour personnes âgées Kalchbühl, qui était prête à me donner une chance. »

Le grand voyage et la nouvelle vie d’Ashu / Enfin un apprentissage (3/4)

« En août 2018, j’ai pu commencer mon apprentissage AFP de cuisinier. Le lundi je me rends à l’école professionnelle et les autres jours à la cuisine du home pour personnes âgées. De temps à autres je travaille aussi le week-end, ce qui me permet de profiter de quelques jours libres pendant la semaine. Je trouve le travail très stimulant et mes collègues sont sévères avec moi. Je pense que c’est bien, car il m’arrive d’oublier quelque chose et ils me motivent à apprendre davantage. Après mon AFP, j’aimerais terminer mon apprentissage de cuisinier et travailler ensuite quelques années dans ce domaine. Mais je sais qu’il y a aussi d’autres métiers que j’aurais du plaisir à exercer. Vu que je parle cinq langues (allemand, anglais, hindi, pachtou et persan), j’aimerais bien travailler en tant que guide touristique. Ce serait génial d’aller chercher les gens à l’aéroport et de leur montrer la ville de Zurich. Je leur expliquerais quand a été construite la Grossmünster et je les amènerais dans tous les beaux endroits. Et si ça ne fonctionne pas, je trouverais aussi formidable de travailler en tant que chauffeur de bus à Zurich, car j’aime beaucoup cette ville. »

Le grand voyage et la nouvelle vie d’Ashu / Mon engagement pendant mon temps libre (4/4)

« Je m’engage au sein de l’association « Colors sans Frontières », qui vise à créer des espaces de rencontre pour les personnes du monde entier souhaitant se rencontrer à Zurich. Avec cette association, je me rends une à deux fois par mois au centre d’accueil temporaire pour requérants d’asile dans la halle d’exposition 9 de la foire de Zurich.  Ce site héberge surtout des familles, des mineurs voyageant seuls et des femmes.  Nous invitons les personnes pour un brunch et les écoutons. Beaucoup d’entre elles osent raconter leur histoire, et c’est une grande aide que je puisse comprendre leur langue. Nous allons également à la halle un mercredi sur deux pour inviter les enfants à jouer avec nous. L’été, nous jouons dehors au foot ou à ce qui leur fait plaisir ; par exemple, avec les enfants d’Afghanistan nous jouons au cricket, car c’est un jeu qu’ils connaissent. L’hiver, nous restons dans la halle et nous jouons aux cartes.

Vu que j’aime beaucoup ce travail, avec des amis j’ai fondé en mai l’association « Kollektiv – Freizeit mit Freunden ». Je fais partie du comité et je suis responsable de la révision des comptes. Notre objectif est de rassembler les personnes afin qu’elles puissent se soutenir mutuellement. »

Kodess Boujnah / SpeakOut! (1/4)

«Je me souviens très bien de mon tout premier Kick-off Event dans le cadre du projet SpeakOut! qui était en même temps mon premier jour de travail au contact direct des mineurs non-accompagnés (MNA). Cet événement m’a particulièrement marqué, car très vite, un lien à la fois triste et touchant s’est créé, qu’il est difficile d’expliquer.

Chaque événement est organisé avec l’aide des bénévoles qui nous soutiennent dans les différentes activités. Ce week-end-là, ma mère avait accepté de faire la cuisine pour les participant-e-s. Chose étrange, elle qui pensait être la seule en charge de cette mission s’est retrouvée assistée d’un MNA afghan. En fait, ce genre de choses arrive souvent, il y a toujours des participant-e-s qui n’ont pas forcément envie de participer tout du long aux activités, mais préfèrent se consacrer à d’autres tâches. Quand ils veulent nous aider, ce n’est pas un problème pour nous. Nous leur laissons cette liberté et les intégrons dans le cadre de diverses autres tâches. Ce qui était ici inhabituel, c’était les motivations du jeune afghan, que ma mère m’a exposées après avoir longuement discuté avec lui.»

Kodess Boujnah / SpeakOut! (2/4)

«Le jeune afghan a vu sa mère mourir devant ses yeux et a par la suite perdu son père dans des circonstances tragiques. Pendant tout le week-end, on a eu l’impression que le MNA retrouvait dans ma mère la sollicitude et l’empathie qui lui manquaient tant depuis la mort de la sienne. C’est elle qu’il voyait dans cette inconnue et en faisant la cuisine à ses côtés, il avait le sentiment d’avoir de nouveau une mère.

Il faut savoir que ma mère se comporte de façon très maternelle, que ce soit lors de cet événement ou avec nous à la maison, lorsqu’elle fait des activités avec moi et mes trois frères et sœurs ou lorsque nous cuisinons ensemble. Et je ne dis pas ça parce que c’est ma mère, mais parce qu’elle a tout simplement la bienveillance dans le sang! Le jeune afghan l’a senti et a donc passé le plus de temps possible avec elle durant le week-end. C’était beau de voir un jeune avec une si triste histoire s’ouvrir et trouver en ma mère une interlocutrice à qui se confier. Après l’évènement, ma mère m’a dit que c’était très émouvant.»

Kodess Boujnah / SpeakOut! (3/4)

«Je ne sais pas si c’est bien que les choses se soient passées ainsi, mais pour ma mère et pour moi aussi, ce n’est pas toujours facile de garder de la distance. Moi qui ai connu l’immigration et qui ai pas mal de tempérament, je sais que nous sommes proches et que nous avons besoin de la famille. Elle a beaucoup d’importance pour nous, raison pour laquelle il est difficile, pour moi et ma mère, de garder nos distances avec des gens à qui il manque précisément une famille et ce sentiment de proximité.
Il ne faut pas oublier que les MNAs sont des mineur-e-s qui sont arrivés en Suisse sans leurs parents et ont le plus souvent été très tôt confrontés à des situations difficiles. C’est beau de voir qu’après les nombreux obstacles qu’ils ont dû surmonter, des projets comme SpeakOut! – lequel a malheureusement pris fin récemment – puissent leur redonner pour un court instant un sentiment de proximité et de sécurité.

Je pense que ce moment a été émotionnellement très intense pour toutes les personnes impliquées. C’était d’un côté très triste, au vu de l’histoire de vie du jeune afghan, et d’un autre très beau, celui-ci ayant retrouvé l’espace d’un instant le sentiment de sécurité qui lui manque tellement.»

Kodess Boujnah / SpeakOut! (4/4)

« Mes souhaits :

Les mineurs non accompagnés demandeurs d’asile ont eu une vie difficile ! Notre tâche ici en Suisse est de leur offrir soutien, protection et information afin qu’ils puissent forger leur avenir en toute indépendance. 

Qu’il s’agisse de réfugiés, de jeunes issus de l’immigration qui ont grandi ici ou de personnes sans antécédents d’immigration, tous les jeunes sont, selon moi, un enrichissement pour la société et doivent donc être traités et soutenus de la même manière. Peu importe d’où ils viennent, quelle langue ils parlent et en quoi ils croient.

Il est très important pour moi de continuer à faire entendre la voix des mineurs non accompagnés, que ce soit dans le cadre d’un projet ou autrement. Leurs revendications ne doivent pas être oubliées et il est de notre devoir de les transmettre et de les prendre au sérieux. »